Le carnaval de la nuit éternelle (Bicolline) Juchée parmi les pics brumeux du plateau Dulgare, jaillit la cité de Gotwald, joyau des Terres du Sud. Affublée du titre de « ville qui ne dort jamais », la capitale de la province de Dulgaron est à la fois un haut lieu de culture et un caniveau misérable où viennent pourrir orphelins ambitieux, artistes maudits, seigneurs exilés ainsi que toute une litanie de bricons et coupe-jarrets. Bouillon de culture mitonnée par la louche de fer de son Prince, l'infâme Resther Saint-Félix et ses félons-poètes de l’Arrogance, Gotwald est donc un bijou architectural aux relents d'urine.
La légende raconte que chaque décennie, uniquement dans cette région du monde, se produit un phénomène tout à fait inhabituel: le soleil se voit masqué d'un disque noir d'origine inconnue. Certains pensent qu'il s'agirait du vestige de quelque magie, d'autres que la lande même est maudite pour un crime depuis longtemps oublié. Chose certaine, l'éclipse n'a jamais la même durée; parfois le soleil ne disparaît qu’une journée, parfois une semaine. Il est même possible de trouver dans les archives de Dulgaron, le récit d’une éclipse s'étant étalée sur plus de quatre mois.
Étonnamment, le phénomène est source de joie pour la populace qui en profite pour s’adonner à une de ses plus anciennes traditions: le Carnaval de la nuit éternelle. Alors que le soleil détourne son regard, les citoyens de tous acabits, y voient l'occasion de laisser libre à leurs plus bas instincts. Toute la durée de l'éclipse, sévit dans les rues, une mascarade tonitruante de badauds masqués qui s'enivrent en laissant libre cours à leurs inhibitions dans l'obscurité du dédale des ruelles. Les gueux deviennent des seigneurs et vice versa, on se met à quatre pattes en aboyant comme des cabots de caniveau, tout ce qui est affreux devient sublime et bien sûr, on fait fi des interdits.
Cette fois-ci, désireux de souligner l'évènement de la plus mémorable de toutes les festes, Resther Saint-Félix (baptisé « le prince de la nuit » par certains pour cette habitude de ne jamais exposer sa peau au soleil) fit venir jusqu’à lui son bouffon Yorick Lefou ainsi que dame Susanna de la célèbre troupe de théâtre des Mille-Visages, afin de l'appuyer dans l'élaboration d’une mise en scène défiant l'imagination.
C'est ainsi donc, après des mois de préparation pharaonique, d'infrastructures décoratives aussi chambranlantes qu'ambitieuses, ainsi que dun nettoyage systématique de toutes les latrines de la cité que la capitale Dulgare se voit prête à vous accueillir! Soyez les bienvenus, voyageurs et ambassadeurs venus de contrées lointaines pour observer un phénomène que plusieurs ne voient qu'une fois dans une vie. L'éclipse pourrait s'arrêter à tout moment et le tohu-bohu du Carnaval de la nuit éternelle ne fait qu’en redoubler d'ardeur au détour de chaque ruelle.
Bienvenue à Gotwald. |