Les ruines fumantes (Bicolline)

Au retour de la grande bataille ayant opposé le Concordat d'Outre-mer à la Fédération argannaise, les champs de bataille laissés en ruines et encore fumants furent rapidement la cible de pillards et de mercantis avides. Ces derniers, attirés par la promesse d'un butin à moindre coût, erraient parmi les corps, ramassant tout ce qui pouvait avoir de la valeur : armes abandonnées, armures endommagées, et surtout les richesses des soldats tombés, qu’ils dépouillaient sans hésitation. Leur seule loi était celle du profit, leur unique morale, celle du gain.

Cependant, leurs activités ne se faisaient pas sans opposition, Au milieu des carcasses calcinées, des groupes de fanatiques religieux se mirent à surgir des coins sombres de la campagne. Pieds nus, vêtus de haillons, ces hommes et femmes, en transe, se flagellaient avec des chaînes de fer, considérant que les guerres incessantes étaient la manifestation de la fin des temps. Selon eux, les grandes batailles marquaient le prélude à l'arrivée de l'Innonmable, une entité ancienne et terrifiante, dont les légendes racontaient qu'elle ramènerait les calamités de jadis. Ce n'était plus Seulement un conflit entre royaumes, c'était une guerre spirituelle, une purification nécessaire pour préparer le monde à l'Apocalypse.

Les fanatiques, dans leur délire, voyaient les mercantis comme les agents du mal, des charognards aggravant la souillure du monde. Ils les attaquaient sans pitié, croyant qu’en les exterminant, ils purifiraient les champs de bataille des restes impies. Armés seulement de leur foi et de quelques armes rudimentaires, ils fonçaient sur ces pillards avec une furie aveugle, guidés par leur désir de voir la fin du monde se produire dans une pureté retrouvée.

Mais tous ne se laissaient pas abattre par ces conflits entre charognards et fanatiques. Plus haut, dans les collines et les vallées environnantes, six généraux, chacun à la tête de son propre contingent, avaient d'autres desseins. Refusant de rentrer chez eux les mains vides, ces hommes et femmes de guerre ne considéraient pas leur mission comme terminée. Ils s'étaient tournés vers une nouvelle entreprise : la recherche de trésors sur ces terres dévastées. Avec eux, de véritables petites armées étaient constituées, recrutées spécialement pour cette tâche. Il ne s'agissait pas simplement de chercher au hasard, mais de fouiller méthodiquement chaque recoin de la région dévastée, espérant y trouver des trésors enfouis, des richesses cachées ou des reliques oubliées.

Ils avaient entendu des rumeurs d'anciennes cachettes, de trésors légendaires perdus pendant les guerres précédentes, des richesses laissées par des civilisations anciennes. Chaque vallon, chaque forêt dense, chaque caverne obscure pouvait contenir des secrets-que les soldats trop pressés d'achever la guerre avaient laissés derrière eux. Et eux, ces six généraux, étaient patients, et savaient que la véritable victoire ne résidait pas dans la gloire des batailles, mais dans les trésors qu'ils ramèneraient une fois la poussière retombée.