La Rixe de L'Épine de Fer (Bicolline)

Août 1022. Les braves hommes et femmes des guildes de Derthorn et Ferrata Fidelis montent leurs campements de guerre de part et d’autre du même chemin de terre battue, dans les clairières fraîchement défrichées communément et mystérieusement connues sous le nom de « Cité ». Nul ne pouvait alors se douter des conséquences funestes éventuelles de cette circonstance autrement anecdotique. D’un côté, Ferrata Fidelis, une guilde singulière, adepte de la mode classique ayant traversé les âges depuis le siècle de Léonis le Lacédémonien. Une troupe au parcours sinueux tel l’estuaire du Zimbe, dont l’errance traversa en quelques années les Terres du Sud, la Cité des Sables, l’Empire, pour finalement jurer allégeance au jeune Roy d’Andore. De l’autre, Derthorn, jeune guilde chevaleresque ayant investi les Commanderies abandonnées des sables maudits de Tessali-El-Nail et Annaba-Jabel, et vouant un culte, selon la rumeur, à un savant mélange de vin rouge et de tranches d’oranges.

Prestement, au fil des batailles et des soirées endiablées, les chefs Sebastian Vivelame et Gilles Marcus Flaminius développent une franche camaraderie, basée sur des intérêts communs, tels que la chasse, l'aptitude martiale et le maintien de l’ordre public.

Octobre 1022. Les deux guildes se réunissent à nouveau, plantant leurs pavillons près de la cité de Mehl-El-Nail, que certains qualifieraient de « L’Arta Morna de l’est. » À l’heure du loup, le symposium bien entamé, des hurlements simiesques lointains interrompent leur discussion Sebastian agrippa son homologue, et, le fixant droit dans les yeux, lui dit: « Mon cher, promettez moi que jamais nos fiefs, ni notre Cité, ne deviendront des repaire de malfrats sans foi ni loi, à l’instar des faubourgs malfamés des Terres du Centre!»

Et Gilles de répondre « Mon brave, je le promets! Pour nous en assurer, nous devrions nommer un Shérif… non, mieux, un Hokage, qui sèmerait la peur et le respect dans le cœur des vilains!” Vivelame haussa le sourcil, pantois devant ce vocabulaire exotique. Sentant le malaise, le centurion enchaina:
« Dans le langage de Grands Fleuves, Hokage, «Ombre de Feu, désigne un guerrier des ombres mythique, contre lequel nul gredin ne saurait tenir.
-Fort bien, et qui auriez-vous en tête pour cette position, brave gaillard?
-Moi même, bien sûr.»

Soudainement, le temps sembla figé. Leurs paupières se plissèrent. Le silence se fit durant de longues secondes, brisé par le cri strident d’un aigle se faisant entendre sur le zéphyr. Au loin, les bois de deux cerfs s’entrechoquent. Les chefs finirent leur coupe d’un trait, et les déposant sans briser le contact oculaire, prirent congé vers leurs quartiers respectifs. Les présages étaient aussi funestes que clairs: deux peuvent convoiter le titre, un seul pourra devenir Hokage de la Cité.

Or donc, il advint qu’au lever du soleil, la rixe de l’Épine de Fer fut déclarée.